Enregistrez cet article pour le consulter plus tard

Jean-Pierre Bekolo décrypte le phénomène de la jalousie chez les Camerounais

La jalousie, ou plutôt l’envie, est l’un des maux les plus profondément enracinés dans la société camerounaise. Pour le cinéaste Jean-Pierre Bekolo, cette émotion, bien que présente à l’échelle mondiale, constitue un frein majeur aux dynamiques sociales et économiques du pays. Dans ses propos, il soulève la nécessité d’une thérapie radicale et audacieuse pour traiter ce mal: réinventer les imaginaires grâce à des récits inspirants, portés notamment par le cinéma et l’Afrofuturisme.

 

La jalousie, un obstacle à l’épanouissement collectif

Jean-Pierre Bekolo décrit la jalousie comme une émotion complexe qui naît de l’envie d’obtenir ce que l’on ne possède pas. Elle se transforme en culpabilité, en honte et en frustration, et engendre souvent une haine envers ceux qui possèdent ce que l’on désire. La peur de ne jamais réaliser ses propres aspirations alimente encore davantage cette dynamique. Au Cameroun, ces sentiments sont exacerbés par des facteurs tels que la pauvreté, les inégalités sociales et le manque d’opportunités. Dans une société où la compétition est omniprésente, ces émotions créent des tensions destructrices, mettant en péril toute possibilité de coopération et de progrès collectif.

La jalousie, un frein à la cohésion sociale

Dans la culture camerounaise, la jalousie se manifeste notamment dans la musique populaire, où les artistes expriment leur frustration face à l’envie et à la méfiance qui les entourent. Beaucoup de chansons font référence à cette difficulté de vivre avec le succès dans un environnement où “les jaloux vont mourir” est un refrain fréquent. Cependant, Bekolo souligne que cette rhétorique, loin de guérir le mal, n’en fait qu’entretenir le cycle de ressentiment qui perpétue la jalousie. Le constat est amer : dans un contexte où les ressources sont rares et les opportunités limitées, la jalousie devient un poison qui freine le développement social et économique du pays.

La foi en l’avenir : une thérapie pour guérir la jalousie

Pour Bekolo, la solution à cette maladie sociale réside dans la foi en l’avenir. La jalousie naît de l’incertitude et du doute quant à l’avenir. Lorsque l’on ne croit pas en ses chances de réussir, l’envie se transforme en frustration et amertume. Mais, en projetant une vision d’un futur meilleur, inclusif et accessible, les individus peuvent se libérer de cette envie destructrice. La foi en l’avenir permet de transformer ces émotions négatives en moteurs de progrès, tant au niveau personnel que collectif.

Les églises de réveil, avec leurs promesses de prospérité et d’espoir, incarnent bien cette dynamique de foi. En rassurant les Camerounais sur le fait que “Dieu pourvoira”, elles apaisent l’envie et favorisent l’optimisme face à un avenir incertain. Cependant, la foi seule ne suffit pas : cette projection vers un futur meilleur doit être renforcée par des récits inspirants, capables de nourrir l’espoir et d’offrir de nouveaux modèles de réussite.

L’art de raconter des histoires : un remède contre la jalousie

Jean-Pierre Bekolo propose une thérapie fondée sur l’art de raconter des histoires. En reconfigurant l’imaginaire collectif à travers des récits inspirants, en particulier ceux véhiculés par le cinéma, il est possible de changer la perception que les Camerounais ont de la réussite et de la compétition. Le cinéma, selon Bekolo, joue un rôle central dans cette transformation. Il devient un outil thérapeutique pour déconstruire les mentalités de rareté et de peur, et promouvoir une vision d’abondance, où le succès de chacun est perçu comme une opportunité pour tous.

Dans cette perspective, l’Afrofuturisme émerge comme un projet de société puissant. Il propose un avenir où chacun, quel que soit son origine ou son statut social, peut avoir accès à des opportunités équitables. Il offre une vision alternative à celle de la compétition féroce qui alimente la jalousie. Pour Bekolo, il s’agit de redéfinir le succès, non plus comme une victoire personnelle, mais comme un levier de transformation collective.

Construire un avenir commun grâce à l’Afrofuturisme

L’Afrofuturisme, qui réinvente le futur à travers une perspective inclusive, devient ainsi un antidote à la jalousie. En offrant une vision de société où les ressources sont partagées et les opportunités accessibles à tous, il permet de neutraliser les émotions destructrices liées à l’envie. Ce projet doit être porté par les artistes, les cinéastes et les intellectuels, mais aussi par les acteurs politiques qui devront concrétiser cette vision dans la réalité.

L’ambition de Bekolo est de développer un “Healing Cinéma”, un cinéma thérapeutique qui permet de réparer les individus par l’imaginaire. Mais il insiste sur le fait que, pour que cette transformation ait lieu, elle doit être accompagnée d’une politique qui soutienne la création de ce futur rêvé. Ce travail sur l’imaginaire collectif, porté par des récits afrofuturistes, est essentiel pour guérir la société camerounaise des ravages de la jalousie.

Abonnez vous !

Rejoignez les 218autres et Ne ratez plus l'essentiel de l'actualité au Cameroun et ailleurs

Nous ne spammons pas ! Consultez notre politique de confidentialité pour plus d’informations.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Retour en haut